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Flughafengefängnis, Boudry et Kantonaler Polizeiposten Flughafen In Switzerland (From the report of the European Committee for the Prevention of Torture 2021 visit to Switzerland)

E. Personnes faisant l’objet de mesures de contrainte en matière de droit des étrangers, (Read full CPT report)

236. Le CPT a examiné la situation des étrangers détenus en vertu de la législation sur les étrangers lors de sa visite en Suisse en 2007158. Au cours de la visite de 2021, la délégation a effectué deux visites ciblées au Centre de détention administrative pour étrangers (Abteilung Administrativhaft) à la prison de l’aéroport (Flughafengefängnis) à Zurich-Kloten (canton de Zurich)159 et au Centre fédéral pour demandeurs d’asile de Boudry (CFA) à Perreux (canton de Neuchâtel)160. Elle a également visité le poste de police de l’aéroport (Kantonaler Polizeiposten Flughafen) à Zurich- Kloten (canton de Zurich) et rencontré un étranger détenu en vertu de la législation sur les étrangers à la prison préventive de Soleure (voir également la partie B du rapport).

237. Le cadre législatif suisse régissant la détention administrative161 de ressortissants étrangers en
vertu de la législation sur les étrangers a subi des modifications importantes depuis la visite du CPT
en 2007. La Loi fédérale sur les étrangers et l’intégration (LEI) de 2005 a été modifiée plus de 40 fois
depuis, et pour la dernière fois le 1er octobre 2021162.

La loi réglemente les différentes formes de détention administrative (c’est-à-dire les “mesures
de contrainte”) qui peuvent être appliquées aux ressortissants étrangers et qui peuvent être
combinées163. Selon l’article 79, la détention administrative ne peut en principe pas être appliquée
pendant plus de six mois, mais peut être prolongée jusqu’à 12 mois supplémentaires, conformément
au droit communautaire, notamment si la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité
compétente. La durée totale de la détention administrative ne peut donc pas dépasser 18 mois en droit
suisse.

Alors que les enfants (accompagnés et, exceptionnellement, non accompagnés et les familles
avec enfants) âgés de 15 à 18 ans peuvent être placés en détention administrative pour une durée
maximale de 12 mois, la détention de ceux âgés de moins de 15 ans n’est pas autorisée. En outre, les
besoins spécifiques des personnes vulnérables, des enfants non accompagnés et des familles doivent
être pris en compte. Par lettre du 9 mars 2021, les autorités suisses ont informé le Comité que le nombre d’enfants âgés de 15 à 18 ans placés en détention administrative avait continué à diminuer et que, dans la pratique, cette mesure était extrêmement rare.

238. Les articles 81 et 82 modifiés en 2019 stipulent désormais que la privation de liberté des
étrangers doit avoir lieu dans des établissements destinés exclusivement à la détention administrative.
Si cela n’est pas possible dans des cas exceptionnels, notamment en raison de capacités insuffisantes,
les étrangers détenus doivent être hébergés séparément des prévenus. En outre, depuis 2014, la
Confédération peut financer tout ou partie de la construction et de l’aménagement d’établissements
de détention cantonaux si ceux-ci servent exclusivement à la détention administrative des étrangers.

Ce principe a également été confirmé par le Tribunal fédéral dans un arrêt rendu le 31 mars
2020. Dans son arrêt, le Tribunal précise que la détention administrative doit, en principe, être
effectuée dans des établissements spécialement conçus à cet effet, avec un équipement et un
aménagement qui doivent, dans la mesure du possible, éviter des conditions de détention de type
carcéral. En particulier, l’étranger concerné ne peut être placé dans un établissement pénitentiaire que
dans des circonstances exceptionnelles et pour des raisons justifiées, et même alors, seulement pour
quelques heures ou quelques jours. La séparation avec les détenus condamnés ou prévenus doit être
garantie. Les autorités suisses ont ainsi reconnu que l’exécution de la détention administrative des
ressortissants étrangers différait de l’exécution des sanctions pénales. Le CPT se félicite de ces
développements positifs

239. Cela dit, seuls cinq centres de détention pour étrangers étaient en service au moment de la
visite. Il n’existe cependant pas de données statistiques précises sur le nombre de places disponibles
aux fins de la détention administrative des ressortissants étrangers dans l’ensemble de la
Confédération ainsi que sur leur occupation166. Les besoins des cantons à cet égard auraient été
évalués et adaptés et plusieurs projets de construction sont en cours (notamment à la prison de
l’aéroport de Zurich-Kloten) pour augmenter la capacité globale.

240. En outre, la plupart des cantons continuent de placer les détenus étrangers dans des sections
ou des cellules spécifiques des établissements pénitentiaires (une trentaine de prisons sont encore
utilisées à cette fin) pendant les premières étapes de la détention, pour une durée pouvant aller jusqu’à
plusieurs jours167, avant de les transférer dans un établissement dédié à la détention administrative.

Ce faisant, l’exécution de la détention administrative est régie par les dispositions prévues
dans la législation cantonale, qui renvoie le plus souvent aux règles et au régime applicables en
matière d’exécution des peines ou de détention provisoire et qui doivent être appliquées par analogie.
Par exemple, à la maison d’arrêt de Soleure, la délégation a rencontré une femme de nationalité
étrangère qui était enfermée seule dans une cellule dans les mêmes conditions de détention et le même régime (pauvre) que celui appliqué aux personnes en détention provisoire, ce qui impliquait qu’elle devait passer 23 heures par jour dans sa cellule (voir paragraphes 79-80)168.

Tout en reconnaissant que les ressortissants étrangers sont généralement détenus dans des
établissements pénitentiaires pour quelques jours seulement, le CPT réaffirme que le milieu carcéral
– et en particulier un régime de détention provisoire – n’est, par définition, pas approprié à la détention
administrative de personnes faisant l’objet de mesures de contrainte en vertu de la législation sur les
étrangers. S’il est jugé nécessaire de priver des personnes de leur liberté en application de la législation
sur les étrangers, celles-ci devraient être transférées rapidement et hébergées dans des centres
spécialement conçus à cet effet, offrant des conditions matérielles et des programmes d’activités
adaptés à leur situation juridique et disposant d’un personnel ayant les qualifications requises.

241. Le CPT recommande aux autorités suisses de redoubler d’efforts pour transférer
rapidement les ressortissants étrangers qui font l’objet de mesures de contrainte en vertu de la
législation sur les étrangers dans des centres spécifiquement conçus pour la détention
administrative et pour éviter leur détention en milieu carcéral. Jusqu’à leur transfert, il
convient de s’assurer que les personnes concernées bénéficient de conditions matérielles et d’un
régime appropriés, lorsqu’il n’existe pas d’alternatives à leur placement exceptionnel en milieu
carcéral.

Le Comité souhaiterait également recevoir des informations actualisées sur les projets
d’augmentation du nombre de places dans les centres dédiés à la détention administrative, ainsi
que des données statistiques précises sur la capacité globale des lieux de détention
administrative dans toute la Confédération, tant dans les centres dédiés que dans les
établissements pénitentiaires.

En outre, le CPT recommande aux autorités suisses de poursuivre leurs réflexions sur les
alternatives possibles à la privation de liberté afin de permettre leur application en pratique
pour éviter le recours à la détention administrative des ressortissants étrangers.

242. Le centre de détention administrative de l’aéroport de Zurich, ouvert en 1996, comptait quatre
quartiers (un par étage) pour une capacité totale de 106 places pour la détention administrative
d’étrangers (dont un quartier séparé de 20 places pour les femmes et un quartier actuellement utilisé
à des fins de quarantaine). Chaque étage pouvait être séparé en trois sections, si nécessaire. Au
moment de la visite, 28 hommes étaient détenus dans l’établissement. L’étranger qui avait été détenu
le plus longtemps y était depuis trois mois et demi. Les autorités ont informé le CPT qu’il était prévu
de restructurer et de rénover l’ensemble de la prison de l’aéroport, y compris la partie qui était encore
utilisée pour l’exécution des peines de prison (avec actuellement 94 places), afin de permettre une
capacité accrue et d’assurer un environnement moins carcéral, conformément à la jurisprudence du
Tribunal fédéral. Le CPT souhaiterait recevoir des informations actualisées sur les travaux de
rénovation prévus.

243. À la suite d’un processus de réforme du droit d’asile qui a abouti en mars 2019, les centres
dits fédéraux pour demandeurs d’asile (CFA) permettent d’héberger des ressortissants étrangers
pendant la durée de leur procédure d’asile pour un maximum de 140 jours169. Il existe actuellement
plus de 4 000 places dans ces centres. Selon l’article 80 du CP, l’autorité compétente du canton où se
trouve le centre est chargée d’ordonner la détention en vue de l’exécution du renvoi ou de l’expulsion
des requérants d’asile déboutés hébergés dans les CFA. L’Ordonnance relative à l’exploitation des
centres de la Confédération et des logements dans les aéroports règle la vie quotidienne dans les CFA.


244. Le CPT a décidé d’effectuer une visite ciblée au CFA de Boudry à Perreux, à la suite de la
publication de plusieurs rapports et de la réception de plusieurs communications de diverses
organisations170. Le centre a été ouvert en avril 2018 et est géré par le Secrétariat d’État aux migrations
(SEM). Le centre dispose de deux bâtiments d’hébergement principaux : un pour les hommes seuls
(Les Erables – 220 places) et un pour les femmes seules, les familles et les personnes vulnérables
(Les Buis – 120 places). Un troisième bâtiment, qui accueillait également certains demandeurs d’asile
(Les Cèdres – 140 places) était utilisé à des fins de quarantaine dans le contexte de la pandémie. Au
moment de la visite, il accueillait 198 demandeurs d’asile, dont 34 mineurs non accompagnés, pour
une capacité officielle de 480 places.

245. Comme mentionné dans l’introduction ci-dessus, la délégation du CPT a rencontré un manque
de coopération de la part du personnel tout au long de sa visite au Centre et certaines informations
ont été difficiles à obtenir. La délégation a été informée que les ressortissants étrangers étaient
habituellement hébergés dans le Centre pour une durée moyenne d’environ 50 jours, bien qu’à
l’occasion la période ait été supérieure à la durée légale maximale 140 jours. En effet, une personne
présente au moment de la visite avait été hébergée pendant 180 jours. La direction du Centre n’a pas
été en mesure de fournir à la délégation une quelconque justification légale pour la détention d’une
personne au-delà de 140 jours. Le CPT souhaiterait être informé du nombre de cas où des
demandeurs d’asile ont été hébergés au CFA de Boudry pour des périodes supérieures à 140
jours pour les années 2020 et 2021 et leur justification.

246. Le CPT se félicite de certaines mesures annoncées par le SEM depuis la fin de la visite, telles
que l’enquête externe sur certains incidents survenus dans des centres fédéraux, la suspension
d’employés de sociétés de sécurité privées qui avaient commis des erreurs, l’initiation d’un audit
interne par le SEM, la révision des procédures liées à la sécurité (y compris le recrutement du
personnel de sécurité et leur plan de formation) et la possibilité d’introduire un bureau de plaintes
externe pour les demandeurs d’asile. Le CPT souhaiterait être informé en détail de toutes les
mesures prises par le SEM concernant le CFA de Boudry, y compris les résultats des enquêtes
ouvertes.


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